
Le féminisme n’a pas tout d’un mouvement unitaire. Il a traversé des générations et des siècles, des pays et des continents. Mais il s’inscrit surtout dans divers contextes spacio-temporels et socioculturels. Le féminisme islamique est lui ancré dans un contexte religieux islamique.
Loin d’un féminisme importé
Parler de féminisme et d’islam serait oxymorique pour beaucoup de Musulmans et non-Musulmans. Autant du côté des fondamentalistes islamistes que du côté des islamophobes pour qui l’islam serait foncièrement machiste.
Le feminisme islamique naît dans le cadre religieux de l’islam. Il rejoint le féminisme judaïque et le féminisme chrétien déjà présents. Il adopte la notion d’égalité et de justice sociale communes à tout mouvement féministe.
Contrairement aux idées de ses détracteurs, le féminisme musulman n’émane pas d’une volonté de copier l’Occident. Son contexte d’émergence en dit long d’ailleurs. Bien que l’expression ne survienne que vers les années 1990 en Iran. Pourtant dès le XIIe siècle les réflexions du philosophe musulman Averroes étaient poussées dans ce sens.
Une féministe musulmane invitait justement à décoloniser le féminisme. Cette tendance qui fait croire qu’il serait l’apanage de l’Occident. J’ajoute que le féminisme n’a pas de pays de naissance. Le féminisme naît dans les consciences.
Pour revenir à la période d’émergence du féminisme islamique… Au Maghreb en tout cas, elle correspond à la période des revendications indépendantistes. Les féministes défendent l’émancipation de leur pays et celle des femmes. En Égypte on citerait les féministes nationalistes alliés de Nasser. Pourtant, la France, prétendue modèle de référence, à cette époque était encore sexiste. Les maghrebins s’opposaient par exemple au code civil napoléonien qui faisait des femmes des mineures.
Féminisme islamique et musulman.e feministe
Sunset femmes, ©️Sarah_Loetscher via pixabay
Le feminisme islamique est surtout présent dans les pays arabes musulmans. Ce mouvement conteste le statut social et politique reculé des femmes. Il revendique une (re)lecture féminine des Textes. Une pensée islamique qui évolue comme le suggère le philosophe sénégalais Souleymane Bachir Diagne.
« La pensée de l’Islam est en mouvement et ne devrait pas être pétrifiée «
Ainsi les revendications des féministes musulmanes se justifient par l’esprit égalitaire des Textes sacrés. Mais ces Textes nécessitent une contextualisation, une historicisation. Ce qui aboutirait à une égalité conforme à l’intention des Textes.
Les contestations se fondent donc sur l’effort de l’ijtihad (reflexion, interprétation des textes). Et les juristes et/ou théologien.nes islamologues soulèvent les questions féminines problématiques de la religion. Ces spécialistes affirment la nécessité de relire les Textes sans les lunettes patriarcales. Ils rejettent ainsi les interprétations rigoristes médiévales effaçant les femmes de la société.
D’où la volonté que les femme puissent devenir légalement « mufti » (interprète de la loi musulmane). Jusque-là seuls les hommes accèdent à ce titre dans les pays musulmans.
Par ailleurs le musulman féministe est un féministe de manière générale. Il est de confession musulmane. Son feminisme n’a pas une envergure religieuse. Il est plutôt de tendance juridique générale et sociale.
Et si je prenais mon exemple pour illustrer ? Je dirais que je suis féministe et musulmane. Je vis au Sénégal. Ce dernier est un pays laïc. Mais il y a encore des lois discriminatoires.
En outre pour militer, le musulman feministe vivant dans un pays laïc n’a pas besoin de convoquer les Textes. Cependant, le féminisme islamique occupe de plus en plus les débats en Europe. En fait Il est souvent revendiqué par les originaires du Maghreb. Il obtient une place importante dans les études féministes modernes.
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