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Turquie : Erdogan sur les traces de l'Empire Ottoman

La Turquie de Recep Tayyip Erdogan s’immisce de plus en plus dans les conflits du Moyen-Orient, notamment avec la Syrie. Elle est également présente dans le conflit libyen et s’impose même en maître à Tripoli. Erdogan veut porter l’influence de la Turquie du Moyen-Orient à la Méditerranée. Ce qui nous fait penser… à l’expansion de l’Empire Ottoman.

Influence grandissante dans le monde arabe

Avec le retrait progressif des troupes américaines en Syrie et en Irak, la Turquie obtient un feu vert au Proche-Orient. C’est principalement contre les YPD (Unités de protection du peuple) que la Turquie agit. Elle les considère comme une branche du PKK (parti des travailleurs kurdes) d’Irak. Ankara multiplie les frappes à Idleb et avance sur le territoire syrien à partir de la frontière au nord. S’opposant à tout établissement d’une région kurde autonome dans cette région frontale, Ankara exige une zone tampon. Cette dernière serait, selon le régime, dédiée aux trois millions de réfugiés syriens présents sur le territoire.

En Irak, le régime islamo-conservateur turc s’établit au nord. Il agit contre le PKK, considéré comme terroriste par les Européens et les Etats-unis. Bagdad dénonce officiellemnt une violation de sa souveraineté nationale. Mais Erdogan persistera tant que le PKK reste en place. Comme à Idleb avec l’armée syrienne libre, la Turquie dispose d’un allié à Erbil avec les autorités du Kurdistan irakien. Et mieux, des spécialistes affirment que l’Irak elle-même soutient la Turquie face à l’ennemi commun qu’est le PKK.

Le retour en Libye, en Afrique

Depuis l’échec du printemps arabe, la Turquie est dans la nécessité de renouer avec les pays pétroliers. En effet la révolution a provoqué en Egypte la chute des Frères musulamans alliés de la Turquie. L’avènement au pouvoir d’Al Sissi en 2013 a anéanti les espoirs turcs d’avoir une base sur la mer rouge. Au Soudan, Erdogan menait avec l’ancien régime un projet de réhabilitation du port de Suakin. Cette ancienne possession de l’empire ottoman sert de porte sur la mer rouge. Mais depuis la révolution Soudanaise, les cartes sont redistrubuées.

En Libye, le pays eurasiatiques gagnent un partenaire énergétique et économique de taille. Et ce grâce à son soutien indéfectible au gouvernement légal de Tripoli. Ainsi en cas de victoire totale de Fayez el Sarraj, la Turquie réclamera une zone économique exclusive. Avant le printemps arabe, Ankara était déjà très présente à Tripoli. En cas de succès total contre le maréchal Haftar, la Turquie dispose d’une zone d’influence sur la Méditerranée orientale. Pour rappel, la Méditerranée orientale dispose d’importantes réserves de pétrole et de gaz. C’est pour cela que l’Egypte avait d’ailleurs crée le Forum du gaz de la Méditerranée orientale. Ce forum exclut strictement la Turquie en regroupant entre autres l’Italie, Chypre, la Grèce.

La Turquie face à l’OTAN et à l’UE

 DrapeauxTurquie, Union européenne
Drapeaux Turquie, U.E Crédit photo: @PublicDomainPictures via piaxabay

Ankara fait une démonstration militaire importante au Proche-Orient. Elle y mène une influence grandissante. Pendant que l’Iran s’étouffe sous les sanctions américaines, Paris s’oppose farouchement aux entreprises turques notamment en Lybie. Membre de l’OTAN, Erdogan ne cherche pas à se mettre à dos l’alliance. Il veut au contraire qu’elle se rallie à sa cause.

La Turquie est une menace pour l’Union Européenne. Mais elle en devient en même temps une opportunité !

Pour la question des migrants, et les tensions en Grèce, la Turquie est une menace. Les politiques internationales turques et européennes sont divergentes. Concernant Chypre, la Turquie s’éloigne un peu plus de l’UE. Les chantages avec des flux migratoires ont été une arme principale pour solliciter l’Europe dans son opération en Syrie. Mais le continent reste hostile et prône la protection des minorités kurdes. La France et la Turquie s’opposent sur tous les fronts. L’OTAN a donc une position délicate devant les tensions grandissantes entre deux membres.

Outre la capacité de contrôler le flux de réfugiés syriens, la Turquie pourrait gérer d’autres déplacements vers l’Europe. La Libye abrite beaucoup de migrants. Certains aspirent à traverser la Méditerranée pour l’Italie. D’autres traversent la mer Égée pour les îles grecques. Ce qui offre à Ankara des moyens supplémentaires de faire pression sur l’Europe.

Victime du Brexit et devant une crise économique post coronavirus, l’Union-Européenne gagnerait à travailler avec le régime turc. Non seulement la Turquie jouit d’une position géostratégique. Elle est le pont qui joint le vieux continent au Moyen-Orient. Mais aussi, elle mène une politique internationale stratégique avec succès. Néanmoins, sa politique, bien qu’intéressante, est en contradiction avec la politique européenne.

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Auteur·e

vivredanslemonde

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