Quatre mois après les premiers cas de coronavirus à Dakar, la population a adopté des attitudes assez différentes et parfois contradictoires. Ces attitudes ne sont pas liées au nombre de contaminations mais plutôt au séjour « trop long » du virus. On est passé des appréhensions au déni du coronavirus!

Il était une fois…
Il fut un temps à Dakar… le coronavirus. Le « coronavirus » est un mot que les Dakarois ont entendu plusieurs fois dans la presse internationale à la fin de l’année 2019. Le coronavirus s’était emparé de Wuhan en décembre et on commençait déjà à beaucoup parler de ce virus. Les médias de masse mettaient en avant la létalité de la maladie. À Dakar, on ne le citait souvent que pour stigmatiser le peuple chinois. Des vidéos montraient l’alimentation « étrange« (vu d’ici) de quelques Asiatiques circulaient sur WhatsApp ?
Quelques semaines plus tard, on voit le coronavirus arriver en Occident. Il se propage donc en Europe. Il affecte aussi les États-unis. Nous le voyions alors ainsi : « un virus des Blancs« . Parfois avec de l’humour, mais… on le sait, le second degré est souvent utilisé pour faire passer des idées étranges que l’on garde dans un coin de la tête. En tout cas, on a cherché par tous les moyens à défier le coronavirus et à lui montrer que notre territoire y était hostile. « Le coronavirus ne résiste pas à la chaleur de l’Afrique de l’Ouest » disait-on.
Les Sénégalais sont joyeux et drôles, ils ont un sens de l’humour débordant sur les réseaux sociaux. Ils en ont usé pour faire toute sorte de blague sur la Covid-19. Mais… en réalité le Sénégal était inquiet. Les jeunes internautes savaient que le système sanitaire risquait d’être frappé de plein fouet par la pandémie, au cas où elle s’installerait. À partir de ce moment, et jusqu’à l’annonce des premiers cas au Sénégal, le coronavirus fut fort redouté.
Dakar dans le déni du coronavirus
Revenons au présent! Début juillet, en plein centre de Dakar, je m’arrête. Rien ne me rappelle que le coronavirus est encore là. J’ai l’impression que c’est désormais de l’histoire ancienne. Je regarde autour de moi, aucun visage masqué. Les solutions hydroalcooliques que l’on glissait dans la poche ou dans le sac à main ne sortent plus. Dans les transports en commun, c’est presque comme avant. Les lieux publics sont massivement fréquentés, sans protection aucune.
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Tout est presque comme avant. En fait, tout revient à la « normale » progressivement depuis l’allègement du couvre-feu. L’Etat du Sénégal a d’ailleurs levé l’état d’urgence, ce qui fait encore plus enterrer l’idée de l’existence toujours présente du coronavirus. Dakar plonge donc dans le déni, sans compter ceux qui n’ont jamais cru à l’existence du virus! J’allais oublier: au début du mois de juin, les jeunes ont même manifesté, brutalement, contre le couvre-feu. Et pourtant la contamination n’a pas faibli. Elle est encore d’actualité. Mais son suivi est désormais réservé aux soignants et au ministère de la santé.
Ce n’est plus l’affaire du Dakarois qui veut reprendre sa vie normale et ses activités économiques. Ce Dakarois, lassé par les mesures barrière. Celui qui intègre cette phrase « ça n’arrive qu’aux autres » dans son esprit…
Comment trouver un mouton pour l’eid el kabir ? C’est désormais la nouvelle préoccupation dans la capitale. Les vendeurs de thermoflash, de masques ou de gels alcooliques ont fini d’accaparer les réseaux sociaux. Maintenant, place aux vendeurs de moutons, de foin et de tissus pour la fête à venir. La fête de la tabaski qui sera de loin mieux célébrée que la fête de la fin du ramadan, entièrement marquée par la lutte contre la pandémie.
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